« …C’est vers Quincy Jones qu’il faut se tourner. Les Beatles avaient George Martin, arrangeur et réalisation hors pair. Venu du classique, il les aida à accoucher de morceaux d’anthologie en les poussant à expérimenter. Mickael Jackson, quant à lui, put compter sur un monstre sacré de la musique noire américaine… Originaire de Chicago, trompettiste de formation, Quincy Jones a accompagné tous les développements de la deuxième partie du XXe siècle, depuis le jazz jusqu’au hip-hop.. Il fut l’un des premiers à prédire l’importance de la musique de rue, avec la pertinence du visionnaire qu’il fut. Quincy Jones avait démarré au début des années 1950 dans l’orchestre de Lionel Hampton, collaborant aussi avec son proche ami Ray Charles. Il s’installa en France en 1957, où il prit des cours avec Nadia Boulanger et Olivier Messiaen, devenant directeur artistique des disques Barclay et se liant d’amitié avec Boris Vian ou Henri Salvador. De retour aux Etats-Unis, il fut le premier Noir vice-président d’un major de disque (Mercury), avant de devenir compositeur de musiques de films à succès et arrangeur demandé (pour Franck Sinatra, Peggy Lee ou Ella Fitzgerald)… En trois albums (Off the Wall, Thriller et Bad), Quincy Jones et Mickael Jackson ont révolutionné la musique populaire. Le légendaire producteur a permis à l’artiste de s’inscrire dans une filiation musicale qui remontait jusqu’à Messiaen en passant par le jazz, la soul, le funk, la pop ou le rock. Il lui a offert également un son et une réalisation hors pair, qui ont fait de chacun des titres qu’ils ont gravé ensemble des standards encore écoutables plus de vingt ans après. Dès le début des années 1990, la star travailla avec d’autres arrangeurs, dont aucun ne sut l’emmener à nouveau vers ces sommets… Mickael Jackson a été immensément populaire sans rien sacrifier de l’exigence musicale. Il a été adulé par des millions de personnes qui ne savaient peut être rien des états de service de Quincy Jones. Pourtant, il n’aurait certainement pas pu accomplir ses différents coups de génie sans l’apport d’un musicien aussi savant et bon connaisseur des développements de la musique populaire que Quincy Jones… »
by Olivier Nuc, in Le Figaro, mardi 30 juin 2009