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L’Europe est mal partie dans le siècle (2/4)

« … Les conflits autour de la régulation des marchés et des banques, l’échec de la Conférence de Copenhague ou l’enlisement des négociations commerciales du cycle de Doha montrent qu’il sera difficile pour les Etats dont la crise a renforcé le nationalisme économique, d’inventer les institutions et les règles p planétaires qui sont devenues indispensables. Le G2, composé des Etats-Unis et de la Chine, dominera la planète, mêlant rivalité pour le leadership et coopération. (…), leur relation sera placée sous le signe d’une entente politique impossible et d’une guerre économique improbable. L’Europe, qui inventa le capitalisme au XVIIe siècle, se trouve menacée de relégation, loin derrière les pôles de second rang comme l’Inde, le Brésil ou la Russie, mais aussi l’Afrique (…). Après avoir renoncé être un acteur stratégique, prix à payer pour les guerres suicidaires du XXe siècle, l’Europe se prépare à devenir un tiers pôle du XXIe siècle. Un continent en déclin démographique, avec la perte de 54 millions d’habitants d’ici à 2050. Un continent riche mais stagnant, où le blocage de l’activité et le chômage permanent créeront des tensions politiques et sociales fortes, ouvrant de larges espaces aux démagogues et aux extrémistes. Un continent sans investissement ni innovation, tout entier tourné vers son histoire, coupé des idées et des mouvements qui feront le XXIe siècle. Un continent moins soumis à des menaces extérieures, car à l’écart des rapports de force mondiaux, qu’otage de sa perte de vitalité, de ses divisions et de son impuissance. Alors qu’un avenir radieux lui semblait promis en 1989 avec la reconquête de son unité et de sa souveraineté, l’Europe a décroché dans la mondialisation. Au sortir de la crise, la croissance potentielle est inférieure à 1 %, aggravant le recul de 20 à 15 % de son poids dans le PIB mondial et de 28 à 22 % de sa part dans les échanges commerciaux enregistrés depuis 10 ans. Le continent s’enferme dans le chômage permanent et le surendettement des Etats, qui atteint 88 % du PIB en 2010 et dépassera 120 % du PIB dans la décennie contre 30 % du PIB dans le monde émergent et 52 % du PIB pour l’Etat fédéral américain. Parallèlement, les engagements de retraite culminent à 440 % du PIB. D’où la crise de la dette souveraine qui n’est nullement cantonnée à la Grèce ou au Portugal mais touche l’Europe entière. (…) La BCE, conçue sur le modèle de la Bundesbank pour combattre l’inflation des années 1970, est exemplaire de l’archaïsme des institutions et des principes d’une Europe qui s’enferme dans des politiques insoutenables et se prépare à devenir un continent perdu pour le développement. »

By Nicolas Baverez, in Le Figaro, 26 avril 2010

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