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Conseil constitutionnel : la nouvelle révolution, quelle place pour la loi ? Nouveau gouvernement des juges et des avocats… !

« Les justiciables pourront bientôt demander aux tribunaux de saisir le Conseil constitutionnel pour statuer sur la conformité à la Constitution d’une loi qu’on prétend leur opposer. Le projet de loi qui met en œuvre cette innovation, instituée lors de la révision constitutionnelle de juillet 2005, a été adopté mercredi 8 avril 2009 en Conseil des ministres. A l’occasion d’un procès, les plaideurs auront désormais le droit d’invoquer la non-conformité à la Constitution d’une législation en vigueur. Les justiciables – et surtout leurs avocats – pourront soulever l’exception d’inconstitutionnalité devant le tribunal de grande instance ou le tribunal administratif. Les juges seront tenus d’adresser les requêtes à leur juridiction suprême – la Cour de cassation pour l’ordre judiciaire, le Conseil d’Etat pour l’ordre administratif –, qui jouera un rôle de filtre et transmettra au Conseil constitutionnel les affaires qui lui paraissent sérieuses. Les Sages du Palais-Royal auront alors la faculté de déclarer contraire à la Constitution une loi en vigueur, fût-ce depuis plusieurs décennies, voire plusieurs siècles. Il est néanmoins permis de voir autant de dangers que d’avantages à cette réforme. La lenteur de la justice et l’encombrement des prétoires vont augmenter. Le filtre de la Cour de cassation et du Conseil d’Etat ne suffira peut-être pas toujours à éviter une victoire de la chicane, une insécurité juridique et une moindre efficacité de l’action publique. Certains craignent que l’exception d’inconstitutionnalité dévalorise la loi, ravalée au rang d’un banal arrêté municipal que chacun peut contester devant un tribunal. La France se rapproche du modèle judiciaire américain, ou les magistrats possèdent un droit de vie et de mort permanent sur les lois adoptées par le Congrès. Et, comme outre-Atlantique, le Parlement est perçu par une partie des milieux judiciaires comme un oppresseur en puissance. Cette situation est-elle viable à terme, alors que les Français attendent tant de leurs élus et de l’Etat ? En 1921, dans Le Gouvernement des juges, l’universitaire Edouard Lambert démontrait comment, aux Etats-Unis, une loi « court le risque, pour peu qu’elle affiche une allure quelque peu réformatrice, d’échouer avant d’arriver au port ou de n’y parvenir qu’après avoir subi des amputations ou des retouches ». Si ces craintes se vérifient en France, l’électeur finira par maudire le justiciable. »

In Le Figaro du 10 avril 2009 Par Guillaume Perrault

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