C’est une percée dans le dialogue entre chrétiens d’Orient et d’Occident, séparés depuis un millénaire: aujourd’hui doit être rendu public le premier document conjoint entre catholiques et orthodoxes qui reconnaît formellement la primauté du pape. Depuis le schisme de 1054, la place du pape dans la chrétienté est une pomme de discorde, qui a fait couler de l’encre et du sang.
Le texte intitulé « Conséquences ecclésiastiques et canoniques de la nature sacramentelle de l’Eglise – Conciliarité et synodalité dans l’Eglise » est le fruit du travail de la commission de dialogue théologique entre Eglises catholiques et orthodoxes, qui s’est réunie à Ravenne (Italie) en octobre. Les signataires reconnaissent que l’Eglise de Rome « occupe la première place dans l’ordre canonique et que l’évêque de Rome est donc le tout premier parmi les patriarches » (dans l’Eglise primitive, ils étaient cinq: Rome, Constantinople, Alexandrie, Antioche et Jérusalem). Une petite révolution qui fixe la route à suivre pour accentuer le rapprochement entre orthodoxes et catholiques. Car des subtilités byzantines demeurent. En effet, si la primauté du pape et de Rome est reconnue, il reste à définir les prérogatives exactes du chef de l’Eglise catholique. Sur ce point, les désaccords demeurent.
Absence de l’Eglise russe
Chez les orthodoxes aussi la situation est complexe. Ainsi, en octobre, la délégation du patriarche orthodoxe de Moscou a quitté la réunion de Ravenne, à cause d’un désaccord avec le patriarcat de Constantinople, qui avait invité à la rencontre une délégation de l’Eglise apostolique estonienne. Cette dernière n’est pas reconnue par Moscou. L’Eglise orthodoxe russe regretterait aussi que des Eglises sous son autorité (Etats-Unis et Japon en particulier), n’aient pas été invitées… Pour faire part de leur mauvaise humeur, les Russes avaient d’ailleurs publié une première mouture des conclusions de la rencontre, qu’ils n’ont pas signées. Ils ont déjà émis des réserves sur le paragraphe 39 du texte, qui reconnaît une prééminence au patriarcat de Constantinople.
In Le Figaro, le 15 novembre 2007, by Hervé Yannou