Le mythe est de faire du phénomène de la mondialisation une rupture radicale.
Que ce soit pour la magnifier ou la combattre les partisans et les adversaires de la mondialisation sont au moins d’accord sur un point : c’est une rupture fatale dans l’histoire des civilisations et des relations internationales. Certains pensent à la suite de Francis Fukuyama, que nous vivons en quelque sorte la fin de l’histoire où le progrès exponentiel des techniques, l’immédiateté des communications et la généralisation planétaire des échanges annoncent l’adhésion de tous les peuples de la terre au modèle de la démocratie libérale qui marque le dépassement des passions nationales et le triomphe de la raison dans l’histoire. D’autres attribuent cette mutation à la domination impériale de l’hyper-puissance américaine et voient la menace d’uniformisation des civilisations et du creusement du fossé entre les riches et les pauvres, entre le nord et le sud.
On peut regarder l’histoire sous un autre angle, et s’apercevoir que bien loin d’être une rupture inédite dans l’histoire, la mondialisation en est le moteur. Un moteur aussi vieux que l’aspiration à l’universel : le christianisme s’est toujours donné le but d’une expansion mondiale, mais avant lui Alexandre le Grand, l’empire romain… les frontières étaient imposées par les techniques et les savoirs mais la mondialisation était dans les têtes. Dans toutes les périodes, les prophètes de la décadence redoutaient une dissolution du centre dans la périphérie et une perte de substance de la citoyenneté, c’est le contraire qui se produit.
Certes un bond a été franchi par la découverte de l’Amérique et par les grands voyages. On retrouve le même processus et les mêmes peurs sociales pendant la période de la colonisation (19ème-20ème) qui a vu se produire une révolution des échanges et des transports…
Voir Alain Gérard Slama, « Mondialisation : le mythe de la rupture », in le Figaro du 10 Septembre 2003
Voir aussi : Mondialisation, libéralisme et globalisation, pourquoi 3 fléaux ? (2/5)
Voir aussi : Mondialisation : essai de définition d’une réalité multiple. (1/5)
