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Communautarisme et espace public (2) : Le communautarisme voilà l’ennemi !

L’incendie d’une synagogue à Strasbourg en 2002 et les profanations en tous genres qui régulièrement et implacablement ont lieu depuis 4 ans nous amènent à réfléchir sur les ressorts profonds de notre malaise français. Ceux qui ont commis et commettent de tels actes se situent clairement dans la logique communautariste dont ils sont prisonniers : ils n’estiment plus être des citoyens français, mais agissent – en conscience – en tant que représentants de factions, de minorités et de ligues diverses. Ils voient, dans le cas de Strasbourg, en chaque juif non pas un citoyen de la République française, mais le membre d’une minorité particulière.

Ainsi le communautarisme substitue à la citoyenneté des allégeances tribales et guerrières. Il peut rapatrier n’importe quel état de guerre sur le sol national, déclencher des violences extrêmes entre français. Fondamentalement le communautarisme nie le droit des personnes, bafoue l’autorité républicaine, privilégie le terrorisme au débat démocratique, et préfère les tribus (ethniques, culturelles, sexuelles, sociales…) à la citoyenneté respectueuse de la liberté, de l’égalité et de la fraternité. Quelle sera, en effet, la place du citoyen si tout sujet international, politique ou sociétal devient violence ? Quelle sera sa place si c’est la minorité la plus active ou la plus agressive ou la plus forte qui l’emporte ? Pourra-t-on être encore citoyen si nous pouvons uniquement exister fractionné en tant que consommateur, administré, électeur, assujetti, usager, jeune, vieux, breton, basque, juif, musulman, chrétien, corse, beur, gay, bobo… ? Une Nation est certes composée d’individus différents les uns des autres, mais ce qui permet de vivre ensemble est justement le sentiment d’appartenance à quelque chose qui dépasse nos différences, à un ensemble qui nous rassemble, à une famille, une collectivité à laquelle on croit parce qu’elle véhicule des valeurs générales auxquelles on adhère. Ce sentiment aujourd’hui se perd. Apparaissent les régionalismes exclusifs, les intégrismes religieux, les mouvements communautaristes de toutes sortes, les votes extrémistes, l’abstentionnisme, le recul de l’Etat, la délinquance. Tous ces phénomènes procèdent du même délitement de l’esprit public, de l’abandon de l’exercice de la raison, de la liberté citoyenne et du respect fraternel. En effet, à quoi sert la loi si chacun estime être un solitaire sans référence collective ? A quoi sert le droit commun si plus personne ne reconnaît l’existence d’un espace commun aux citoyens ? Les délinquants nous renvoient le reflet de notre société : aujourd’hui ils ne se considèrent même pas au-dessus de la loi, ils pensent qu’il n’y a pas de loi, sinon celle du plus fort. Aujourd’hui dans la réalité comme dans les urnes, la République est minoritaire. Le mouvement communautariste est un mouvement de repli sur soi devant le recul de l’Etat et l’imposition de la loi du plus fort. Toute notre histoire nous indique le chemin : nous sommes le pays des valeurs universelles ouvertes sur le monde. Nous valons mieux que ça.

Article de Robert Grossmann, Président de la Communauté Urbaine de Strasbourg, Vice-Président du Conseil Régional d’Alsace, in le Figaro magasine, 15 juin 2002

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