« Pour Barack Obama, l’ultralibéralisme et plus largement ce qu’il désigne par « l’absolutisme » des Républicains sont une réaction aux années 60 et au mouvement pour les droits civiques. A l’affirmation des droits aux dépens des devoirs et à la revendication morale des victimes s’est opposé un néoconservatisme brutal prônant le tout marché, le retrait de l’Etat, la baisse de l’impôt, l’abandon des réglementations et les filets de sécurité. Depuis quarante ans, la politique s’est ainsi perdue dans des idéologies du « pour ou contre », du « bien et mal », du « choix entre deux formules toutes faites ». Le président regrette l’avant-68 et conclut : « Ce que nous avons perdu, ce sont ces visions communes qui nous rassemblent. »(…) »
« Cette explication que donne Barack Obama lui-même dans son « livre-programme » (L’Audace d’espérer, Presses de la cité), est indispensable pour comprendre pourquoi il veut rompre avec le capitalisme du tout marché, mais aussi pourquoi il n’est en aucun cas question dans son esprit de revenir au tout Etat. Il a refusé de nationaliser Citigroup ou Bank of America, malgré le coût très élevé de leurs plans de sauvetage pour le contribuable. Au-delà, le fond de sa démarche s’éclaire : il tourne la page des baby-boomers, des idéologues de gauche comme de droite. C’est une démarche pragmatique, qui se décline en trois thèmes : sortir de la crise, changer le mode de croissance des Etats-Unis pour le rendre moins dépendant de la consommation et de l’endettement et, enfin, tempérer le capitalisme. Mais française d’objectif, son ambition reste très américaine : réunir autour du bien commun, des « valeurs » écrasées depuis les années 60 sous le combat des dogmes. L’une de ces valeurs est la confiance dans l’avenir, l’autre est la compassion, prise au sens large de « la responsabilité » des gens « de bonne volonté qui pensent que leur intérêt est inextricablement lié à celui des autres. » On pourra discuter de sa vision des années 60. Mais européaniser l’Amérique ? »