« Sans annoncer clairement la couleur, ce n’est ni plus ni moins qu’un échec total de la contraception que dénonce le rapport de Bérengère Poletti (Ump, Ardennes) sur l’interruption volontaire de grossesse ! Deux femmes sur trois qui recourent à l’Ivg déclarent utiliser une contraception, chiffre qui « sidère » la rapporteur au nom de la délégation aux droits des femmes. Qui blâmer ? Les médecins qui ne prennent pas la peine d’informer suffisamment leurs patientes ? L’Education nationale qui s’est trop longtemps focalisée sur le Sida et répète les mêmes discours « convenus » depuis toujours dans le cadre des cours d’éducation sexuelle ? Les femmes elles-mêmes, qui semblent ne pas avoir tiré profit de la loi de 2004 leur accordant deux semaines de délais supplémentaires pour obtenir une Ivg ?(…) »
« La députée, sage-femme de formation, ne sait pas bien à quel saint se vouer, et se contente d’évoquer une stagnation du nombre d’interruptions volontaires de grossesse. En effet, rien d’alarmant – ni de rassurant – de ce côté-là : 209 700 Ivg en 2206, 206 311 en 2005 et 210 664 en 2004. Chez nos voisins, ce sont les Grecs qui affichent le taux d’avortement le plus bas (4,3 pour 1 000 femmes chaque année), et les Estoniens le plus élevé (31,2). Entre les deux, on trouve de tout. Si la France présente un taux de 14,1 Ivg pour 1 000 femmes, et se place ainsi dans la moyenne européenne, les Suédoises, dont les politiques familiales sont souvent citées en exemple, étonnent avec un taux de 17,2 Ivg pour 1 000 femmes par an. Si le nombre d’Ivg reste globalement stable, le nombre d’Ivg pratiquées sur les mineures augmente d’année en année : + 8,9 % entre 2005 et 2006, soit 13 320 mineures concernées. Apparemment, les pouvoirs publics ont mieux réussi à communiquer sur l’interruption de grossesse que sur la contraception, puisque le nombre de grossesses non désirées est, lui, en diminution. Autre aspect préoccupant : le taux d’Ivg selon les régions varie fortement. En métropole, Ile-de-France et Paca font figure de mauvais élèves, avec des taux variant autour de 20 % (mais peut-être les femmes se rendent-elles volontairement dans les endroits où la prise en charge ne fait pas défaut ?) ; mais la situation est nettement plus préoccupante en Guyane (36,7 %) et surtout en Guadeloupe (39,4 %) La délégation ne peut que recommander un effort spécifique en faveur de ces départements. La délégation a adopté 17 recommandations. Par exemple, améliorer la qualité des outils statistiques. Quatre ans après l’entrée en vigueur de la loi prolongeant de dix à douze semaines le délai pour recourir à une Ivg, on n’a toujours pas la moindre idée du nombre de femmes concernées ! Il faut donc obliger les établissements à répondre aux questionnaires qui leur sont posés chaque année.
Avec toute une génération de gynécologues « militants » qui va partir à la retraite au cours des dix prochaines années, il est important de renforcer la formation initiale des étudiants en médecine. Enfin, la rapporteur plaide également pour que les sages-femmes obtiennent le droit de prescrire les Ivg médicamenteuses. De quoi désencombrer les salles d’attente ! »
In LPP N° 1263 du 3 novembre 2008