« L’individualisation des valeurs » constitue l’interprétation approfondie des résultats de l’enquête EVS publié, dans « la France à travers ses valeurs ».
L’intérêt de cette interprétation tient notamment au fait que l’on dispose désormais de 30 ans de recul depuis la première vague d’enquête, réalisée en 1981.
La thèse de l’ouvrage est exprimée dans le livre de l’ouvrage de Pierre Brechon et deux Olivier Galland, à savoir une progression de l’individualisation des valeurs dans tous les domaines de la vie, qu’il s’agisse de la famille, du travail, de la religion, la politique…
Par « individualisation », les auteurs entendent une « volonté d’autonomie » et la « valorisation des choix individuels » originaux, indépendant des conventions morales sociales. Il s’agit d’être original la construction de sa vie, de ses projets, de son couple…
En effet nous constatons de plus en plus, que les individus ne considère plus les valeurs comme un ensemble de lois intangibles et sacrées, mais « ils en prennent ils en laissent », et se les approprient pour créer leur propre système de valeur.
Cette individualisation concerne les valeurs, non des individus, et ne risque donc pas selon les auteurs d’aboutir à une atomisation de la société.
Les auteurs distinguent en effet nettement les notions individualisation et d’individualisme.
La première, selon la conception de Durkheim, place de l’homme et son bien-être au-dessus de toute chose et s’apparente à un humanisme, tandis que la seconde, dont Tocqueville redoutait l’émergence dans une société égalitaire, consiste, pour les individus à privilégier leurs intérêts personnels au détriment de ceux du groupe et se rapproche de l’égoïsme.
Le processus d’individualisation des valeurs a commencé avant la première vague d’enquête sur les valeurs dès les années 1960, dans le contexte optimiste du ballet, de la libération et de la reconstruction de la France.
Jusque dans les années 1981, l’individualisation correspondait essentiellement à une demande de liberté privée et accompagner la libéralisation des mœurs, l’enquête 2008, révèle que cette demande de liberté privée est désormais assortie d’une demande de régulation publique. En témoigne dans cette enquête, l’indice de confiance dans l’armée et la police, en hausse ou dans le débat public, la revendication d’un mariage homosexuel, c’est-à-dire d’un cadre légal.
La liberté revendiquée consiste à faire tout ce qui ne nuit pas à autrui, dixit la déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Le divorce est donc largement accepté puisqu’il s’agit d’une rupture de contrat entre deux parties consentantes, mais pas adultère, qui est considéré comme une tromperie nuisible aux partenaires.
Le phénomène religieux, le catholicisme en particulier en France, est de plus en plus indépendant des institutions. Les croyances se diversifient, empruntant souvent à d’autre univers culturel, et se scinde en une multitude de positions intermédiaires marquées par le, certains veulent croire sans y parvenir, d’autres croient sans savoir vraiment à quoi…
Les grandes idéologies politiques ne font plus recette, si les abstentions permanentes sont stables, les abstentions intermittentes progressent. Les électeurs sont plus hésitants et ne votes que s’ils ont bien compris les enjeux de l’élection.
La conclusion de ces études permet de montrer que ces deux notions sont différentes, mais l’individualisation ne conduit pas à prôner le culte du chacun pour soi. Au contraire, lorsque l’individualisation croit, l’altruisme et surtout l’implication politique augmente aussi. Il est possible que cette revendication d’autonomie pour les personnes à se mobiliser pour défendre ce qu’ils considère être leurs droits face à des administrations ou un pouvoir politique dont on reconnaît de moins en moins la légitimité à agir au nom de l’intérêt général lorsqu’ils entrent en contradiction avec des droits individuels.. Loin de menacer le lien social, l’individualisation peut donc être une dynamique de cohésion sociale dans la mesure où elle est porteuse de tolérance, empathie et d’acceptation du pluralisme.
Ont été exclu des conclusions de l’individualisme, l’incivisme et la solidarité intergénérationnelle, qui s’en rapproche. Or, il s’avère que l’individualisation est corrélée positivement à l’incivisme et négativement à la solidarité intergénérationnelle ce qui nuance le constat optimiste initial.
En conclusion, le plus vraisemblable cela signifie que la revendication d’autonomie personnelle conduit d’une part à moins respectait les normes publiques telles que l’obligation de payer son billet de train de ne pas frauder le fisc, et d’autre part à ne plus considérer l’entraide entre les générations comme un impératif moral catégorique.
Il semble de plus que la tendance à l’individualisation des valeurs soit commune à tous les pays d’Europe, mais l’intensité de cette tendance varie selon les pays et les écarts restent constants entre eux, comme si ces pays évolués sur des lignes parallèles.
On peut d’ailleurs opposer le nord et le sud de l’Europe, les valeurs traditionnelles étant plus persistante dans le sud. Les normes civiques fortement valorisées par le protestantisme sont plus respectées au nord alors que l’incivisme est plus fréquent au sud. La France particulièrement sécularisée parmi les pays ou coupés se situe entre ces deux pôles : l’influence à la fois des normes religieuses et des normes civiques y a décru.
On peut également écrire que tout ceci témoigne d’une confiance dans les lois du marché assorti cependant une demande de politiques sociales égalitaires.
Si l’on va encore plus loin l’examen des valeurs des Européens est en effet apparaître des aires culturelles, calculer un scandinave ou l’air méditerranéen, qui ne correspondent pas forcément aux frontières des pays.
Il ne semble pas pouvoir être possible d’élaborer un programme politique à partir de ces grandes tendances et notamment des deux tendances générales qui sont relevées : la demande d’autonomie personnelle et la demande de régulation publique.
Voici un constat fort intéressant qui montre les évolutions des comportements non seulement en France mais dans les pays européens.
Il faut remercier FUTURIBLES INTERNATIONAL, de mettre à disposition des études de cette importante qui facilite la compréhension du monde de demain. »
(Compte rendu d’une table ronde du 9 février 2011)
